La meilleure façon d’appréhender cette histoire est de la diviser en trois parties :

  • 1

    L’histoire qui a conduit au litige ;

  • 2

    La demande d’arbitrage elle-même ;

  • 3

    Les suites de l’affaire. Comment la Malaisie tente désespérément de discréditer l’arbitrage dont elle fait l’objet.

Sur ce site, vous trouverez les informations dont vous avez besoin sur les trois.

Tout cela fait référence à ce qui s’appelle aujourd’hui Sabah.

Cette saga juridique découle de la cessation unilatérale par la Malaisie du paiement des loyers de ce qui est aujourd’hui l’État de Sabah, une portion de territoire située à l’extrémité nord de l’île de Bornéo, ainsi que des eaux qui l’entourent. Aux XVIIIe et XIXe siècles, le territoire appartenait au sultan de Sulu, un souverain local qui dirigeait un empire maritime s’étendant sur toute l’Asie du Sud-Est. Ce territoire est loué en vertu d’un accord datant de 1878, en notre qualité d’héritiers du Sultan de Sulu qui est à l’origine de l’accord et dont le descendant nous l’a légué en 1936. Pour être clair, il n’y a aucune incidence juridique par rapport à qui prétend être l’actuel sultan de Sulu. Ce qui importe, pour notre part c’est de savoir qui a hérité du contrat de 1878 de notre côté. Pour sa part, la Malaisie a hérité de l’autre versant du contrat et l’a honoré pendant des années.

Dans le cadre d’un processus décisionnel qui n’a jamais été rendu public, la Malaisie a cessé de payer le loyer du territoire en 2013, ce qui a déclenché une crise juridique et financière lorsque nous avons eu recours à l’arbitrage et obtenu une sentence de 14,9 milliards de dollars.

Cela a également déclenché un désastre constitutionnel entièrement imputable à la Malaisie : Si la Malaisie cesse de payer le bail, le territoire revient aux héritiers du sultan de Sulu, alors que nous n’avions aucunement l’intention de voir le bail prendre fin. Curieusement, bien que les politiciens malaisiens soient prompts à crier à la « menace pour la souveraineté », ils ont du mal à admettre qu’ils ont généré cette menace en traitant le bail de Sabah comme un jouet hérité, mais en omettant de lire les instructions sur la boîte.

En 1878, le sultan a signé un contrat avec une compagnie britannique (Dent Brothers and Co.) pour la location perpétuelle de ses possessions du nord de Bornéo. Les frères Dent ont créé une compagnie des Indes qui a fait faillite en 1946, ce qui a entraîné la reprise du contrat par le gouvernement britannique. La Grande-Bretagne a cédé le territoire à la Malaisie en 1963. Chacune de ces parties successives a versé aux sultans de Sulu et à leurs descendants (les « héritiers », dont ce site web est le reflet) une somme annuelle pour le bail du territoire, jusqu’à ce que la Malaisie cesse silencieusement de payer en 2013.

Pendant toute la durée du contrat, à savoir entre 1878 et 2013, le loyer annuel n’a été augmenté qu’une seule fois, en 1903, passant de 5 000 dollars (mexicains) [monnaie internationale standard à l’époque] à 5 300 dollars. Dans le même temps, la valeur du territoire a augmenté de façon exponentielle, surtout après que des gisements de pétrole et de gaz aient été découverts. Ces dernières années, la valeur du pétrole et du gaz aient a été, à elle seule, de trois à neuf millions de fois supérieure au paiement annuel du bail.

Lorsque la Malaisie a cessé de payer, les héritiers, après avoir tenté de négocier, ont introduit une demande d’arbitrage en vertu du contrat. Cette demande a été entendue d’abord en Espagne puis en France (pour des rasions que vous pourrez lire sur le site). Il en résultant qu’en février 2022, l’arbitre accorda aux héritiers un peu moins de 15 milliards de dollars au titre de la rupture du contrat et d’un concept juridique connu sous les noms de changement de circonstances, imprévisibilité ou imprévision – c’est essentiellement l’idée que les accords à long terme doivent régulièrement être révisés parce que des événements imprévisibles (comme des découvertes massives d’hydrocarbures) se produisent.

Depuis lors, les héritiers sont devenus des Demandeurs et ont tenté de faire exécuter la décision arbitrale (connue sous le nom de « Award ») dans différentes juridictions. Il s’agit d’une procédure juridique technique qui consiste à s’adresser aux tribunaux locaux afin qu’ils transforment une sentence arbitrale en décision de justice. La Malaisie a choisi de ne pas participer à la procédure d’arbitrage qu’elle avait hérité lorsqu’elle a hérité de Sabah, mais en elle conteste maintenant l’exécution dans ces juridictions.

La Malaisie conteste également rétroactivement la sentence arbitrale, ce qu’elle ne peut faire que dans le pays où cette sentence a été rendue (en l’occurrence, la France). Cette procédure se déroulera au cours des deux prochaines années.